À elle

Article : À elle
Crédit: Cellulosique
24 avril 2023

À elle

Dans ce récit, je lui rends hommage. À travers les souvenirs partagés, je me livre avec sincérité, décrivant un lien d’amour tout à fait spécial, né dans les moments de deuil et de solitude.

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Le lendemain du jour qui allait changer sa vie à jamais, je me suis retrouvé à ses côtés. Elle venait de perdre ce qu’elle avait de plus cher, et moi, je n’ai jamais été autre chose que présent. J’ai été là pour elle pendant qu’elle tentait de se reconstruire, de retrouver sa place dans le monde, son nouvel équilibre. Le temps n’a jamais vraiment apaisé sa douleur.

Avant cela, nous étions des étrangers, elle et moi. Je me souviens des moments où elle me demandait de l’aide pour cueillir des pêches. Elle réservait les meilleures pour les visiteurs, les citadins, mais en tant que cueilleur, j’avais le privilège de choisir celles que je garderais.

Nous n’avions presque jamais échangé de paroles, jusqu’au lendemain de son apocalypse, où j’étais là, encore jeune et incapable de comprendre pleinement le monde, mais je lui tenais la main pendant qu’elle pleurait. Quand tout le monde était parti et qu’elle se retrouvait seule, j’étais là pour lui dire que tout irait bien. Elle n’a jamais vraiment cru en ces mots.

Elle était différente des autres. Elle n’a presque jamais pris soin de moi, je ne me souviens pas de ses recettes favorites. Elle ne m’a jamais chanté pour m’endormir ou veillé sur mes nuits quand j’étais malade. Elle n’était pas tenue de le faire. Cependant, pendant sa traversée du désert, j’ai appris à la connaître suffisamment pour savoir qu’elle n’aimait pas ceux qu’elle devait aimer, mais plutôt ceux qu’elle voulait aimer. J’ai donc gagné son amour par ma simple présence, et elle m’a fait sentir que je le méritais. Un amour étrange peut-être, né du deuil et de la solitude Exupérienne, celle qu’on ressent en étant entouré des gens, mais pas pour ça moins fort et réel.

Son agonie a commencé il y a bien longtemps. Bien avant que les douleurs physiques ne deviennent son quotidien, les douleurs de son âme l’avaient envahie. Avec sa perte, elle s’était perdue elle-même, et elle n’a trouvé en moi, ni en personne, les raisons de faire la paix avec la vie ou la mort.

Elle n’était pas comme les autres grands-mères, mais elle me ressemblait en quelque sorte, et désormais elle n’est plus. Pas besoin de condoléances, je vous en prie. Réconfortons-nous ensemble car une personne que j’aime énormément a enfin retrouvé la paix qu’elle avait même cessé de chercher.

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Commentaires

BAMBA SIAKA DOH OUATTARA
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C'est profondément triste, mais divinement beau... Bravo.